Voyage dans le monde du gamelan
Dictionnaire

Gamelan

Gamelan


(Malaysien, indonésien, soundanais, javanais)

La définition que nous proposons a deux composantes : l'instrumentation et l'organisation musicale. En ce qui concerne l'instrumentation, nous suggérons que gamelan soit réservé aux ensembles qui comprennent
  1. des gongs suspendus ou leur substituts, et
  2. des métallophones mélodiques, sous la forme de métallophones à touches ou un jeu de gongs à bosse, ou les deux. (Le carillon de gongs peut être joué par un seul musicien ou réparti entre plusieurs.)
En ce qui concerne l'organisation musicale, nous suggérons que pour qu'un ensemble soit appelé un gamelan sa musique doit typiquement (bien que pas nécessairement dans chaque passage) contenir
  1. au moins deux lignes mélodiques simultanées, apparentées en contenu mais de caractère musical contrasté (par exemple : une mélodie "complète" et son abstraction ; ou une mélodie comparativement simple et un développement plus complexe basé sur celui-là), et
  2. un motif périodique de "ponctuation de gong" marquant répétitions et segmentations internes (éventuelles) des lignes mélodiques.
D'autres instruments et principes musicaux peuvent aussi être présents, mais sans ceux venant d'être énumérés l'ensemble ne devrait pas, nous suggérons, être appelé un gamelan.

Philip Yampolsky, février 1998

N.B. : Dans cette définition, métallophone désigne à la fois l'instrument à touches de métal (notre sens du mot) et l'instrument à gongs horizontaux alignés.

Cette excellente proposition par Smithsonian Folkways Records peut être trouvée sur le site Web du label. Une version plus ancienne de cette définition se trouve dans le livret d'un compact disc du label, le 14ème de leur collection Indonesia.

En spécifiant deux différentes composantes (instrumentation et organisation musicale) Philip Yampolsky nous rappelle qu'un gamelan ne se caractérise pas seulement du point de vue physique. Il faut aussi prendre en compte l'essentiel aspect musical. Il existe en effet des ensembles indonésiens remplissant facilement le premier critère sans pour autant être des gamelans, bien qu'ils comportent souvent des instruments de gamelan. De même, il est possible de jouer une musique de gamelan sur un ensemble n'étant pas un gamelan.

Là où d'autres définitions (par Kunst, MacPhee et leurs disciples) disent couches de dévelopement mélodique, Philip Yampolsky dit ici mélodies simultanées contrastées mais apparentées. La différence semble faible, mais reflète une sensibilité totalement différente dans la manière d'écouter le gamelan. C'est, nous pensons, plus fidèle à l'oreille du joueur de gamelan au sein du contexte psychologique et culturel de sa musique.

Cette définition a aussi l'avantage de placer une bonne distinction entre les ensembles gamelan et les ensembles apparentés ou similaires de l'archipel. Cela nous empêche de nommer tout et n'importe quoi gamelan. Cette définition est utile donc, entre autres, pour mettre en relief la signification profonde de ce qu'est un gamelan, pour garder le concept à l'esprit lorsqu'on utilise le mot gamelan. Alors seulement servira-t-elle de point de départ pour des concepts plus développés.

En poursuivant la lecture du livret, Philip Yampolsky explique quels ensembles se trouvent à l'intérieur de la definition et quels ensembles ne s'y trouvent point. Une définition qui est pour nous très satisfaisante dans le fait qu'elle n'englobe pas l'ensemble gambuh. Mais elle n'est pas totalement satisfaisante non plus, car elle exclut aussi les ensembles balinais gambang, bebonangan, gendér wayang, jègog et jogèd bumbung, considérés par nous comme gamelans.

Nous nous sentirions déjà mieux en remplaçant, dans la première composante,

  1. des métallophones mélodiques, sous la forme de métallophones à touches ou un jeu de gongs à bosse, ou les deux.
par
  1. des métallophones mélodiques à touches ou leurs substituts, et/ou un jeu de gongs à bosse.

Ces substituts auraient des touches de bambou ou de bois. La plupart des gamelans sont certes métalliques, mais ceci n'implique pas qu'ils le soient nécessairement. Qu'elles soient métalliques, en bambou ou en bois, les barres ou les lames ont une forme analogue, une fonction analogue et jouent la même musique. Cette considération résout le cas des gamelans jègog et jogèd bumbung.

Aussi un terme javanais spécifique

Il faut garder à l'esprit que le mot gamelan utilisé dans ce site Web ne peut être assimilé au terme javanais gamelan. C'est comme le mot gong : dans les langues européennes, comme notre français, il désigne une grande variété d'instruments métalliques circulaires, trouvés dans plusieurs pays d'Asie. Il englobe les instruments ou éléments d'instrument indonésiens. Mais en javanais, balinais et autres langues locales, gong désigne un gong bulbé spécifique : grand, grave, suspendu. Bien que nos mots gong et gamelan étaient venus du javanais ou de l'indonésien, la différence est là.

Dans ce site Web, nous appliquons le mot gamelan aux ensembles javanais mais aussi aux ensembles où les Balinais et Soundanais ont traditionnellement appliqué d'autres noms. Le terme javanais original n'est pas aussi générique que le nôtre. Il reflète une tradition javanaise musicale dans sa totalité. En fait, selon son étymologie javanaise, le terme gamelan pourrait dénoter n'importe quel ensemble où il y a percussion. Néanmoins notre terme gamelan et le javanais original concordent bel et bien en grande partie : il n'y a traditionnellement pas de tablas, congas, djembés ou steel drums à Java. Il n'y a donc aucun risque d'utiliser le mot gamelan pour des ensembles d'autres traditions tels que le steel drum ou le kodo.

Mais encore :

Voir aussi :



Étymologie

Javanais : gamel = tenir un marteau, marteler, travailler ou jouer à l'aide d'un marteau ;
gamel + an = ce sur quoi on fait "gamel"

Il est tentant de voir un rapport entre le radical malais gembléng, voulant dire forger, et le javano-balinais gamel/gambel.

En balinais, il y a le mot gambelan, mais il n'est pas utilisé comme gamelan l'est à Java. Dans la tradition balinaise, le mot gong dénote la plupart des gamelans tandis que l'indonésien gamelan y est aussi utilisé aujourd'hui.

Le mot javanais gamelan est allé dans les idiomes malais (y compris le malaysien et l'indonésien) et dans les langues européennes. Vers 1872, le mot gamelhang est défini dans une encyclopédie française.

Autres romanisations

Bali : gambelan.

Orthographe française fantaisiste dans vieux textes : gamelhang


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